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Posté le: 08-02-2009 12:22 Sujet du message: poèsie du net
Comme on voit sur la branche
Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose,
En sa belle jeunesse, en sa première fleur,
Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur,
Quand l'Aube de ses pleurs au point du jour l'arrose;
La grâce dans sa feuille, et l'amour se repose,
Embaumant les jardins et les arbres d'odeur;
Mais battue, ou de pluie, ou d'excessive ardeur,
Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose.
Ainsi en ta première et jeune nouveauté,
Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté,
La Parque t'a tuée, et cendres tu reposes.
Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs,
Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs,
Afin que vif et mort, ton corps ne soit que roses.
Sitôt qu’il vit le Christ dans son adolescence
De campagnard rebelle aux frivoles plaisirs,
Il quitta sa famille afin de devenir
Le modeste curé d’un village de France.
Exalté par sa foi, il prenait la défense
De ceux que le malheur s’acharnait à meurtrir,
Tandis qu’il s’employait à peindre un avenir
Où la fraternité éteindrait la souffrance.
Quand le poids des années se mit à l’affaiblir,
Le prêtre courageux s’obstina à servir
Le Seigneur dont l’amour guidait son existence.
L’évêque, ce matin, l’a sommé de partir,
Si bien que, démuni dans la nuit qui s’avance,
Il prie Dieu d’ordonner sa proche délivrance.
Pas faim aujourd'hui
Normal, je suis un peu morte
Froid seulement
Ils ont froid les morts?
Plus goût à rien
Que cette sale manie de rechercher ta trace
De te quêter partout sans vouloir, pourtant, te rejoindre
Et la bataille de mes pensées, de mes sentiments paradoxaux...
Parfois, je fais semblant d'être en vie
Parfois même, j'étale des couleurs sur une toile
Pour faire diversion
Pas longtemps, sans passion
Je me force
Je n'aime plus ce que je fais
Posté le: 10-02-2009 12:09 Sujet du message: poèsie du net
La neige
La neige tombe, indiscontinûment,
Comme une lente et longue et pauvre laine,
Parmi la morne et longue et pauvre plaine,
Froide d'amour, chaude de haine.
La neige tombe, infiniment,
Comme un moment -
Monotone - dans un moment ;
La neige choit, la neige tombe,
Monotone, sur les maisons
Et les granges et leurs cloisons ;
La neige tombe et tombe
Myriadaire, au cimetière, au creux des tombes.
Le tablier des mauvaises saisons,
Violemment, là-haut, est dénoué ;
Le tablier des maux est secoué
A coups de vent, sur les hameaux des horizons.
Le gel descend, au fond des os,
Et la misère, au fond des clos,
La neige et la misère, au fond des âmes ;
La neige lourde et diaphane,
Au fond des âtres froids et des âmes sans flamme,
Qui se fanent, dans les cabanes.
Aux carrefours des chemins tors,
Les villages sont seuls, comme la mort ;
Les grands arbres, cristallisés de gel,
Au long de leur cortège par la neige,
Entrecroisent leurs branchages de sel.
Les vieux moulins, où la mousse blanche s'agrège,
Apparaissent, comme des pièges,
Tout à coup droits, sur une butte ;
En bas, les toits et les auvents
Dans la bourrasque, à contre vent,
Depuis Novembre, luttent ;
Tandis qu'infiniment la neige lourde et pleine
Choit, par la morne et longue et pauvre plaine.
Ainsi s'en va la neige au loin,
En chaque sente, en chaque coin,
Toujours la neige et son suaire,
La neige pâle et inféconde,
En folles loques vagabondes,
Par à travers l'hiver illimité monde.
Émile Verhaeren
Il l'a aimée,
Un peu, beaucoup,
Passionnément,
Et puis à la folie,
Et c'est alors
Qu'ils l'ont emmené
Contre son gré
Derrière les grilles
D'un sombre asile...
Là-bas il rêve
Toutes les nuits
Qu'il l'aime toujours
Passionnément,
A la folie,
Et il le crie
Tellement fort
Que chaque matin,
Il se réveille,
Le coeur meurtri.
Jean Ferrat
LE SABRE ET LE GOUPILLON
Paroles et musique: Jean Ferrat
Comme cul et chemise comme larrons en foire
J'ai vu se constituer tant d'associations
Mais il n'en reste qu'une au travers de l'histoire
Qui ait su nous donner toute satisfaction
Le sabre et le goupillon
L'un brandissant le glaive et l'autre le ciboire
Les peuples n'avaient plus à se poser de questions
Et quand ils s'en posaient c'était déjà trop tard
On se sert aussi bien pour tondre le mouton
Du sabre que du goupillon
Quand un abbé de cour poussait une bergère
Vers des chemins tremblants d'ardente déraison
La belle ne savait pas quand elle se laissait faire
Qu'ils condamnaient l'usage de la contraception
Le sabre et le goupillon
Et maintes éminences et maints beaux capitaines
Reposaient le guerrier de la même façon
Dans le salon chinois où Madame Germaine
Grâce à ses pensionnaires réalisait l'union
Du sabre et du goupillon
C'était le temps rêvé de tous les militaires
On leur offrait des guerres et des expéditions
Que de manants joyeux sont partis chez Saint-Pierre
Le coeur plein de mitraille et de bénédictions
Du sabre et du goupillon
Quand ils s'en revenaient et d'Asie et d'Afrique
Ils faisaient régner l'ordre au sein de la nation
Les uns possédaient l'art d'utiliser la trique
Les autres sans le dire pensaient qu'elle a du bon
Le sabre et le goupillon
On ne sait plus aujourd'hui à qui faire la guerre
Ça brise le moral de la génération
C'est pourquoi les crédits que la paix nous libère
Il est juste qu'il aillent comme consolation
Au sabre et au goupillon
L'un jouant du clairon l'autre de l'harmonium
Ils instruiront ainsi selon la tradition
Des cracks en Sambre et Meuse des forts en Te Deum
Qui nous donneront encore bien des satisfactions
Du sabre et du goupillon
À la page des textes de Jean Ferrat
À la page des textes
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 11-02-2009 18:07 Sujet du message:
Ondine
Ton rire est clair, ta caresse est profonde,
Tes froids baisers aiment le mal qu'ils font ;
Tes yeux sont bleus comme un lotus sur l'onde,
Et les lys d'eau sont moins purs que ton front.
Ta forme fuit, ta démarche est fluide,
Et tes cheveux sont de légers réseaux ;
Ta voix ruisselle ainsi qu'un flot perfide ;
Tes souples bras sont pareils aux roseaux,
Aux longs roseaux des fleuves, dont l'étreinte
Enlace, étouffe, étrangle savamment,
Au fond des flots, une agonie éteinte
Dans un nocturne évanouissement.
Renée VIVIEN (1877-1909)
(Recueil : Etudes et préludes) _________________
Mon Dieu ! Qu'il faisait froid sur le serre ancestral
Où le vent verglaçait des parcelles de givre
En squelettes de gel, en perles de cristal...
Le mas abandonné avait cessé de vivre.
Et le vent s'engouffrait par les carreaux brisés...
La fenêtre aveuglée comme une orbite vide
Regardait l'horizon, regard martyrisé
Où des perles de gel pleuraient sur la bastide.
Je suis allé revoir la grande salle basse
Où trônait autrefois la grande cheminée.
Plus rien ne subsistait, plus une seule trace
De ce que le foyer avait illuminé...
De la cendre dormait dans le creux de la pierre,
Un peu du souvenir des chaleurs du passé,
Un reste évanoui de la vieille lumière
Qui hanta ces vieux murs croulants et trépassés.
Et le vent qui sifflait à travers la masure
Emportait au dehors dans l'hiver et l'ailleurs,
Comme pour balayer de vieilles déchirures,
La cendre du foyer et celle de mon coeur...
Posté le: 12-02-2009 11:43 Sujet du message: poèsie du net
J'ai bâti la maison idéale
Je l'ai proférée en pierres sèches, ma maison,
pour que les petits chats y naissent dans ma maison,
pour que les souris s'y plaisent dans ma maison.
Pour que les pigeons s'y glissent, pour que la mi-heure y mitonne,
quand de gros soleils y clignent dans les réduits.
Pour que les enfants y jouent avec personne,
c'est-à-dire avec le vent chaud, les marronniers.
C'est pour cela qu'il n'y a pas de toit sur ma maison,
ni de toi ni de moi dans ma maison,
ni de captifs, ni de maîtres, ni de raisons,
ni de statues, ni de paupières, ni la peur,
ni des armes, ni des larmes, ni la religion,
ni d'arbres, ni de gros murs, ni rien que pour rire.
C'est pour cela qu'elle est si bien bâtie, ma maison.
Parqués entre des bancs de chêne, aux coins d'église
Qu'attiédit puamment leur souffle, tous leurs yeux
Vers le choeur ruisselant d'orrie et la maîtrise
Aux vingt gueules gueulant les cantiques pieux ;
Comme un parfum de pain humant l'odeur de cire,
Heureux, humiliés comme des chiens battus,
Les Pauvres au bon Dieu, le patron et le sire,
Tendent leurs oremus risibles et têtus.
Aux femmes, c'est bien bon de faire des bancs lisses,
Après les six jours noirs ou Dieu les fait souffrir !
Elles bercent, tordus dans d'étranges pelisses,
Des espèces d'enfants qui pleurent à mourir.
Leurs seins crasseux dehors, ces mangeuses de soupe,
Une prière aux yeux et ne priant jamais,
Regardent parader mauvaisement un groupe
De gamines avec leurs chapeaux déformés.
Dehors, le froid, la faim, l'homme en ribote :
C'est bon. Encore une heure ; après, les maux sans noms !
- Cependant, alentour, geint, nasille, chuchote
Une collection de vieilles à fanons :
Ces effarés y sont et ces épileptiques
Dont on se détournait hier aux carrefours ;
Et, fringalant du nez dans des missels antiques,
Ces aveugles qu'un chien introduit dans les cours.
Et tous, bavant la foi mendiante et stupide,
Récitent la complainte infinie à Jésus,
Qui rêve en haut, jauni par le vitrail livide,
Loin des maigres mauvais et des méchants pansus,
Loin des senteurs de viande et d'étoffes moisies,
Farce prostrée et sombre aux gestes repoussants ;
- Et l'oraison fleurit d'expressions choisies,
Et les mysticités prennent des tons pressants,
Quand, des nefs où périt le soleil, plis de soie
Banals, sourires verts, les Dames des quartiers
Distingués, - ô Jésus ! - les malades du foie
Font baiser leurs longs doigts jaunes aux bénitiers.
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 13-02-2009 16:00 Sujet du message:
Plain chant....
Je n'aime pas dormir quand ta figure habite,
La nuit contre mon cou :
Car je pense à la mort, laquelle vient si vite
Nous endormir beaucoup.
Je vivrai, tu vivras, et c'est ce qui m'éveille !
Est il une autre peur?
Un jour ne plus entendre auprès de mon oreille
Ton haleine et ton coeur.
Quoi, ce timide oiseau, replié par le songe
Déserterait son nid,
Son nid d'où notre corps à deux têtes s'allonge
Par quatre pieds fini.
Puisse durer toujours une si grande joie
Qui cesse le matin,
Et dont l'ange chargé de construire ma voie
Allège mon destin.
Lèger, je suis lèger sous cette tête lourde
Qui semble de mon bloc,
Et reste en mon abri, muette, aveugle, sourde,
Malgré le chant du coq.
Cette tête coupée, allée dans d'autres mondes,
Où règne une autre loi,
Plongeant dans le sommeil des racines profondes
Loin de moi, près de moi.
Ah! je voudrais, gardant ton profil sur ma gorge,
Par ta bouche qui dort
Entendre de tes seins la délicate forge
Souffler jusqu'à ma mort.
O nuit évanescente !
La vois-tu s'éloigner,
Pauvre amante esseulée
Dans l'air moite de l'été
Où volètent au vent
Les phalènes dorés ?
O nuit peu rancunière !
Te souvient-il des heures
De l'insolent désir
Où la tendre victime
Prononçait le prénom
De l'aimé qui ne fut
Qu'un passant très fugace,
Impulsif mais distrait,
Sur l'incertaine route
D'une fille trop crédule ?
O nuit si cafardeuse !
Tu tournes au mélodrame
Comme une barque vide,
Voguant à la dérive.
Il me coule des jambes à la gorge
des envies de bien-être qui ressemblent à des larmes d'imbécile
Mais lorsque tu t'approches
je me noie
me noie dans le désir de toi, lorsque s'approche une telle étrangeté
Pourtant,
tu le sais,
tu n'es
qu'un autre
moi
Il est des jours où les visages sont à mes yeux
d'une indécence à peine supportable
et parfois, aussi,
parfois, douloureusement impuissante,
tel le vertige de l'aigle à sa proie, tombant
je sens
mes yeux arrachés aigus d'une impertinence
blanche,
je sens mes yeux glisser
sous ta peau
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 14-02-2009 17:08 Sujet du message:
La courbe de tes yeux
La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu
C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu.
Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sources des couleurs,
Parfums éclos d'une couvée d'aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l'innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.
Paul ELUARD, Capitale de la douleur (1926) _________________
Jeanne était au pain sec dans le cabinet noir,
Pour un crime quelconque, et, manquant au devoir,
J'allai voir la proscrite en pleine forfaiture,
Et lui glissai dans l'ombre un pot de confiture
Contraire aux lois. Tous ceux sur qui, dans ma cité,
Repose le salut de la société,
S'indignèrent, et Jeanne a dit d'une voix douce :
- Je ne toucherai plus mon nez avec mon pouce ;
Je ne me ferai plus griffer par le minet.
Mais on s'est récrié : - Cette enfant vous connaît ;
Elle sait à quel point vous êtes faible et lâche.
Elle vous voit toujours rire quand on se fâche.
Pas de gouvernement possible. À chaque instant
L'ordre est troublé par vous ; le pouvoir se détend ;
Plus de règle. L'enfant n'a plus rien qui l'arrête.
Vous démolissez tout. - Et j'ai baissé la tête,
Et j'ai dit : - Je n'ai rien à répondre à cela,
J'ai tort. Oui, c'est avec ces indulgences-là
Qu'on a toujours conduit les peuples à leur perte.
Qu'on me mette au pain sec. - Vous le méritez, certe,
On vous y mettra. - Jeanne alors, dans son coin noir,
M'a dit tout bas, levant ses yeux si beaux à voir,
Pleins de l'autorité des douces créatures :
- Eh bien, moi, je t'irai porter des confitures.
Posté le: 15-02-2009 12:25 Sujet du message: poèsie du net
bonjour hier j'ai vu un reportage sur le moulins d'ARAGON et ELSA TRIOLET c'était superbe je vais vous remettre un poème que j'aime particulièrement "lesyeux d'ELSA"
LES YEUX D'ELSA
Tes yeux sont si profonds qu'en me penchant pour boire
J'ai vu tous les soleils y venir se mirer
S'y jeter à mourir tous les désespérés
Tes yeux sont si profonds que j'y perds la mémoire
À l'ombre des oiseaux c'est l'océan troublé
Puis le beau temps soudain se lève et tes yeux changent
L'été taille la nue au tablier des anges
Le ciel n'est jamais bleu comme il l'est sur les blés
Les vents chassent en vain les chagrins de l'azur T
es yeux plus clairs que lui lorsqu'une larme y luit
Tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie
Le verre n'est jamais si bleu qu'à sa brisure
Mère des Sept douleurs ô lumière mouillée
Sept glaives ont percé le prisme des couleurs
Le jour est plus poignant qui point entre les pleurs
L'iris troué de noir plus bleu d'être endeuillé
Tes yeux dans le malheur ouvrent la double brèche
Par où se reproduit le miracle des Rois
Lorsque le coeur battant ils virent tous les trois
Le manteau de Marie accroché dans la crèche
Une bouche suffit au mois de Mai des mots
Pour toutes les chansons et pour tous les hélas
Trop peu d'un firmament pour des millions d'astres
Il leur fallait tes yeux et leurs secrets gémeaux
L'enfant accaparé par les belles images
Écarquille les siens moins démesurément
Quand tu fais les grands yeux je ne sais si tu mens
On dirait que l'averse ouvre des fleurs sauvages
Cachent-ils des éclairs dans cette lavande où
Des insectes défont leurs amours violentes
Je suis pris au filet des étoiles filantes
Comme un marin qui meurt en mer en plein mois d'août
J'ai retiré ce radium de la pechblende
Et j'ai brûlé mes doigts à ce feu défendu
Ô paradis cent fois retrouvé reperdu
Tes yeux sont mon Pérou ma Golconde mes Indes
Il advint qu'un beau soir l'univers se brisa
Sur des récifs que les naufrageurs enflammèrent
Moi je voyais briller au-dessus de la mer
Les yeux d'Elsa les yeux d'Elsa les yeux d'Elsa
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 18-02-2009 18:11 Sujet du message:
Armor
Pour me conduire au Raz, j'avais pris à Trogor
Un berger chevelu comme un ancien Évhage ;
Et nous foulions, humant son arôme sauvage,
L'âpre terre kymrique où croît le genêt d'or.
Le couchant rougissait et nous marchions encor,
Lorsque le souffle amer me fouetta le visage ;
Et l'homme, par-delà le morne paysage
Étendant un long bras, me dit : Senèz Ar-Mor !
Et je vis, me dressant sur la bruyère rose,
L'océan qui, splendide et monstrueux, arrose
Du sel vert de ses eaux les caps de granit noir ;
Et mon cœur savoura, devant l'horizon vide
Que reculait vers l'ouest l'ombre immense du soir,
L'ivresse de l'espace et du vent intrépide
José Maria de Heredia
J'aime la Bretagne, le vent, les vagues et l'odeur de la mer _________________
Posté le: 19-02-2009 11:32 Sujet du message: poèsie du net
MÉLODIE
Comme un couteau dans un fruit
Amène un glissant ravage,
La mélodie au doux bruit
Fend le coeur et le partage
Et tendrement le détruit.
-- Et la langueur irisée
Des arpèges, des accords,
Descend, tranchante et rusée,
Dans la faiblesse du corps
Et dans l'âme divisée...
Murs, ville
Et port,
Asile
De mort,
Mer grise
Où brise
La brise
Tout dort.
Dans la plaine
Naît un bruit.
C'est l'haleine
De la nuit.
Elle brame
Comme une âme
Qu'une flamme
Toujours suit.
La voix plus haute
Semble un grelot.
D'un nain qui saute
C'est le galop.
Il fuit, s'élance,
Puis en cadence
Sur un pied danse
Au bout d'un flot.
La rumeur approche,
L'écho la redit.
C'est comme la cloche
D'un couvent maudit,
Comme un bruit de foule
Qui tonne et qui roule
Et tantôt s'écroule
Et tantôt grandit.
Dieu! La voix sépulcrale
Des Djinns!... - Quel bruit ils font!
Fuyons sous la spirale
De l'escalier profond!
Déjà s'éteint ma lampe,
Et l'ombre de la rampe..
Qui le long du mur rampe,
Monte jusqu'au plafond.
C'est l'essaim des Djinns qui passe,
Et tourbillonne en sifflant.
Les ifs, que leur vol fracasse,
Craquent comme un pin brûlant.
Leur troupeau lourd et rapide,
Volant dans l'espace vide,
Semble un nuage livide
Qui porte un éclair au flanc.
Ils sont tout près! - Tenons fermée
Cette salle ou nous les narguons
Quel bruit dehors! Hideuse armée
De vampires et de dragons!
La poutre du toit descellée
Ploie ainsi qu'une herbe mouillée,
Et la vieille porte rouillée,
Tremble, à déraciner ses gonds.
Cris de l'enfer! voix qui hurle et qui pleure!
L'horrible essaim, poussé par l'aquilon,
Sans doute, o ciel! s'abat sur ma demeure.
Le mur fléchit sous le noir bataillon.
La maison crie et chancelle penchée,
Et l'on dirait que, du sol arrachée,
Ainsi qu'il chasse une feuille séchée,
Le vent la roule avec leur tourbillon!
Prophète! Si ta main me sauve
De ces impurs démons des soirs,
J'irai prosterner mon front chauve
Devant tes sacrés encensoirs!
Fais que sur ces portes fidèles
Meure leur souffle d'étincelles,
Et qu'en vain l'ongle de leurs ailes
Grince et crie à ces vitraux noirs!
Ils sont passés! - Leur cohorte
S'envole et fuit, et leurs pieds
Cessent de battre ma porte
De leurs coups multipliés.
L'air est plein d'un bruit de chaînes,
Et dans les forêts prochaines
Frissonnent tous les grands chênes,
Sous leur vol de feu pliés!
De leurs ailes lointaines
Le battement décroît.
Si confus dans les plaines,
Si faible, que l'on croit
Ouïr la sauterelle
Crier d'une voix grêle
Ou pétiller la grêle
Sur le plomb d'un vieux toit.
D'étranges syllabes
Nous viennent encor.
Ainsi, des Arabes
Quand sonne le cor,
Un chant sur la grève
Par instants s'élève,
Et l'enfant qui rêve
Fait des rêves d'or.
Les Djinns funèbres,
Fils du trépas,
Dans les ténèbres
Pressent leur pas;
Leur essaim gronde;
Ainsi, profonde,
Murmure une onde
Qu'on ne voit pas.
Ce bruit vague
Qui s'endort,
C'est la vague
Sur le bord;
C'est la plainte
Presque éteinte
D'une sainte
Pour un mort.
On doute
La nuit...
J'écoute: -
Tout fuit,
Tout passe;
L'espace
Efface
Le bruit.
Je prends mes peines à tes peines,
Et mon ciel au ciel de tes veines ;
Ton corps est mon vin et mon pain,
Mon sel est au creux de ta main,
Dans la joie ou quand tu défailles
Réclame-moi par tes entrailles -
Pour suivre ton intime loi
L’amour m’a fait naître de toi.
L’amour qui courbe et couche
Les femmes deux à deux,
S’étanche par leur bouche
Et pleure par leurs yeux.
Unir la source à l’eau
Et le son à l’écho
Ou joindre deux rivages
- Sans pont matériel –
Semblables mariages :
Ciel noyé dans du ciel,
Reflet d’un corps à corps palpable comme une âme,
Devenir une femme entre des bras de femme
Posté le: 20-02-2009 13:35 Sujet du message: poèsie
ces quelques vers pour toutes les mamans du monde!!!!!!!
Je prends mes peines à tes peines,
Et mon ciel au ciel de tes veines ;
Ton corps est mon vin et mon pain,
Mon sel est au creux de ta main,
Dans la joie ou quand tu défailles
Réclame-moi par tes entrailles -
Pour suivre ton intime loi
L’amour m’a fait naître de toi.
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 20-02-2009 19:11 Sujet du message:
La Gitane
Ta démarche souple affole les cieux.
Étourdi, le vent dans les buissons gémit,
De son souffle ardent il te caresse, amoureux,
De sa main d'amant mène ton destin indécis.
Gitane au cœur d'enfant ton nom est Antinéa.
Reine d'un continent qui se noie,
Tu enchaînes les hommes et les envoies au trépas.
Ta beauté, démone, enfreint toutes les lois.
Le soir les feux s'allument, violant la douce pénombre.
La chevelure hagarde, danseuse échevelée,
Tu pénètres les hommes d'un éclat sombre.
Leurs regards allumés te caressent dans le prés.
Gitane je suis , mon ascendance me trahit.
Je me nourris de liberté édulcorée.
Assise, la société me toise avec mépris.
Debout, ceinte de ma colère, je les vois avec pitié.
D'innocentes vapeurs
Montaient des casseroles
Mais ta main au panier
(Cette expression est drôle!)
Osait des privautés
Qu'en tout état de cause
Je feignais d'ignorer
(Ayant le dos tourné)
Et que, les rappelant
Je n'ose détailler...
Instants de volupté,
Tablier dénoué
Par une main coquine
Dont l'imagination
Crée d'intenses frissons,
Cependant qu'aux fourneaux
S'oublie le miroton!
Posté le: 21-02-2009 11:24 Sujet du message: poèsie du net
Dans l'air frais du matin ...
Dans l'air frais du matin où s'effare la feuille,
Dans la jeune clarté des jours roses et bleus,
Dans la nuit solennelle et pure où se recueille
L'âme présente encor des bergers fabuleux,
Dans le cristal des eaux, dans le velours des mousses
Dans l'innocence en fleur des jardins radieux,
Dans le concert que font toutes les choses douces,
Je retrouve, ô ma soeur, la douceur de tes Yeux.
Le printemps odorant la divine féerie,
Le renouveau fêtant sa jeune volupté
S'incarne pour mon coeur dans ta robe fleurie
Et dans ton corps exquis comme un rêve sculpté.
Les Parfums, les Couleurs, la tendresse de vivre,
Le mois vierge baigné de souffles et d'encens,
L'enluminure d'or aux marges du Vieux Livre,
O mon âme, c'est dans ton coeur que je les sens.
Le désir qui palpite à travers la nature
Et s'élance en festons étoilés dans les bois,
Je le sens frissonner parmi ta chevelure
Et je le vibre entier, rien qu'à serrer tes doigts.
Ce qui couve d'ardeurs suaves et de fièvres
Au sein mystérieux de la création
Se ramasse en mon coeur pour jaillir vers tes lèvres
Et ruisseler dans l'ombre en adoration.
Voici venir les temps où tu marches déesse,
Où la rose d'amour fleurit à tes seins blancs,
Où ton nom murmuré fiance une caresse
A la suavité des narcisses tremblants.
Voici venir les temps où tes beaux yeux limpides
Semblent plus clairs encore et plus profonds qu'hier,
Et versent à mon coeur plein de songes virides
L'ivresse d'un lever de lune sur la mer.
Et les fleurs sont tes yeux, et la lumière blonde
Ton sourire, et le ciel bleu-frêle ta douceur,
Et tout l'amour fumant de l'encensoir du monde
Ta lèvre sur mon âme appuyée, ô ma soeur
ALBERT SAMAIN
Une lumière évanescente
Se faufile dans le grand bois
Est-ce vous
Qui tenez la lanterne mouvante
Est-ce un autre ?
Ou peut-être un fantôme
Apeuré comme moi ?
Une ombre glisse et me tourmente
Vous ne m’avez pas dit pourquoi
Vous tremblez
Vous aussi
Une odeur de lilas
Accompagne le vent
Qui soudain entre et se lamente
Se lamente ? Pourquoi ?
Puisque dans le grand bois
La lanterne a pris la tangente
Et ce pas
Qui s’en va
N’était qu’un passant
Sur la sente
Beaucoup de mes amis sont venus des nuages
Avec soleil et pluie comme simples bagages
Ils ont fait la saison des amitiés sincères
La plus belle saison des quatre de la Terre
Ils ont cette douceur des plus beaux paysages
Et la fidélité des oiseaux de passage
Dans leurs cœurs est gravée une infinie tendresse
Mais parfois dans leurs yeux se glisse la tristesse
Alors, ils viennent se chauffer chez moi
Et toi aussi, tu viendras
Tu pourras repartir au fin fond des nuages
Et de nouveau sourire à bien d'autres visages
Donner autour de toi un peu de ta tendresse
Lorsqu'un autre voudra te cacher sa tristesse
Comme l'on ne sait pas ce que la vie nous donne
Il se peut qu'à mon tour je ne sois plus personne
S'il me reste un ami qui vraiment me comprenne
J'oublierai à la fois mes larmes et mes peines
Alors, peut-être je viendrai chez toi
Chauffer mon cœur à ton bois
Première voyelle de l’alphabet planétaire
Trois voyelles d’un alphabet de terre
Trois voyelles retranchées en un seul lieu
Deux dernières voyelles en feu
Et toutes les consonnes au souffle de la voix
Silence et vacarme à la fois
Oh l’eau à la bouche avalée
Oh l’eau de la larme à l’oeil
Oh l’eau chaude coulant des yeux
Oh le lait mousseux de la cyprine
Oh l’eau blanche du désir assouvi
Ô toi l’eau circulant dans les veines
Ô toi le circuit invisible
Ô toi le sang bleu de la vie
Ô toi le sang d’encre de la peur
Hope, merci pour l'adresse de cette video, l'interprétation est émouvante et je vais en faire profiter mes amis.
Bernard, je découvre avec bonheur Louky Bersianik ; les larmes me monteraient aux yeux.
Inscrit le: 10 Oct 2006 Messages: 549 Localisation: Pyrénées-Orientales
Posté le: 22-02-2009 16:03 Sujet du message:
Bonjour ... Une Poétesse que j'aime beaucoup
S'il l'avait su
S'il avait su quelle âme il a blessée,
Larmes du coeur, s'il avait pu vous voir,
Ah ! si ce coeur, trop plein de sa pensée,
De l'exprimer eût gardé le pouvoir,
Changer ainsi n'eût pas été possible ;
Fier de nourrir l'espoir qu'il a déçu :
A tant d'amour il eût été sensible,
S'il avait su.
S'il avait su tout ce qu'on peut attendre
D'une âme simple, ardente et sans détour,
Il eût voulu la mienne pour l'entendre,
Comme il l'inspire, il eût connu l'amour.
Mes yeux baissés recelaient cette flamme ;
Dans leur pudeur n'a-t-il rien aperçu ?
Un tel secret valait toute son âme,
S'il l'avait su.
Si j'avais su, moi-même, à quel empire
On s'abandonne en regardant ses yeux,
Sans le chercher comme l'air qu'on respire,
J'aurais porté mes jours sous d'autres cieux.
Il est trop tard pour renouer ma vie,
Ma vie était un doux espoir déçu.
Diras-tu pas, toi qui me l'as ravie,
Si j'avais su !
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 22-02-2009 18:06 Sujet du message:
Merci Ninon
Nous aimons Marceline Desbordes Valmore
alors viens nous faire découvrir de nouveaux textes de cette poétesse
ou d'autres que tu aimes _________________
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 22-02-2009 18:10 Sujet du message:
Dans ma cervelle se promène,
Ainsi qu'en son appartement,
Un beau chat, fort doux et charmant.
Quand il miaule, on l'entend à peine,
Tant son timbre est tendre et discret;
Mais que sa voix s'apaise ou gronde,
Elle est toujours riche et profonde.
C'est là son charme et son secret.
Cette voix qui perle et qui filtre,
Dans mon fonds le plus ténébreux,
Me remplit comme un vers nombreux
Et me réjouit comme un philtre.
Elle endort les plus cruels maux
Et contient toutes les extases;
Pour dire les plus longues phrases,
Elle n'a plus besoin de mots.
Non, il n'est pas d'archet qui morde
Sur mon cœur, parfait instrument,
Et fasse plus royalement
Chanter sa plus vibrante corde,
Que ta voix, chat mystérieux,
Chat séraphique, chat étrange,
En qui tout est, comme en un ange,
Aussi subtil qu'harmonieux!
Inscrit le: 10 Oct 2006 Messages: 549 Localisation: Pyrénées-Orientales
Posté le: 22-02-2009 18:24 Sujet du message:
hope a écrit:
Merci Ninon
Nous aimons Marceline Desbordes Valmore
alors viens nous faire découvrir de nouveaux textes de cette poétesse
ou d'autres que tu aimes
Pas de problème Hope... Y'en a tellement que j'aime de Valmore, mais il n'y a pas qu'elle. Des poètes aussi
Beauté cruelle
Certes, il ne faut avoir qu'un amour en ce monde,
Un amour, rien qu'un seul, tout fantasque soit-il ;
Et moi qui le recherche ainsi, noble et subtil,
Voici qu'il m'est à l'âme une entaille profonde.
Elle est hautaine et belle, et moi timide et laid :
Je ne puis l'approcher qu'en des vapeurs de rêve.
Malheureux ! Plus je vais, et plus elle s'élève
Et dédaigne mon cœur pour un œil qui lui plaît
Voyez comme, pourtant, notre sort est étrange !
Si nous eussions tous deux fait de figure échange,
Comme elle m'eût aimé d'un amour sans pareil !
Et je l'eusse suivie en vrai fou de Tolède,
Aux pays de la brume, aux landes du soleil,
Si le Ciel m'eût fait beau, et qu'il l'eût faite laide !
Inscrit le: 10 Oct 2006 Messages: 549 Localisation: Pyrénées-Orientales
Posté le: 23-02-2009 10:28 Sujet du message:
Bonjour,
Celle-ci est très belle aussi...
Angoisse
Je ne viens pas ce soir vaincre ton corps, ô bête
En qui vont les péchés d'un peuple, ni creuser
Dans tes cheveux impurs une triste tempête
Sous l'incurable ennui que verse mon baiser :
Je demande à ton lit le lourd sommeil sans songes
Planant sous les rideaux inconnus du remords,
Et que tu peux goûter après tes noirs mensonges,
Toi qui sur le néant en sais plus que les morts.
Car le Vice, rongeant ma native noblesse
M'a comme toi marqué de sa stérilité,
Mais tandis que ton sein de pierre est habité
Par un cœur que la dent d'aucun crime ne blesse,
Je fuis, pâle, défait, hanté par mon linceul,
Ayant peur de mourir lorsque je couche seul
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