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Posté le: 23-02-2009 13:11 Sujet du message: poèsie du net
De George Sand à Alfred de Musset.
Cher ami,
Je suis toute émue de vous dire que j'ai
bien compris l'autre jour que vous aviez
toujours une envie folle de me faire
danser. Je garde le souvenir de votre
baiser et je voudrais bien que ce soit
une preuve que je puisse être aimée
par vous. Je suis prête à montrer mon
affection toute désintéressée et sans cal-
cul, et si vous voulez me voir ainsi
vous dévoiler, sans artifice, mon âme
toute nue, daignez me faire visite,
nous causerons et en amis franchement
je vous prouverai que je suis la femme
sincère, capable de vous offrir l'affection
la plus profonde, comme la plus étroite
amitié, en un mot : la meilleure épouse
dont vous puissiez rêver. Puisque votre
âme est libre, pensez que l'abandon où je
vis est bien long, bien dur et souvent bien
insupportable. Mon chagrin est trop
gros. Accourez bien vite et venez me le
faire oublier. À vous je veux me sou-
mettre entièrement.
J'ai porté ton amour au cœur comme un couteau,
Il ne m'a pas laissé même de cicatrice.
La solitude en moi revient, dominatrice :
Peut-être t'ai-je aimée ou trop tard ou trop tôt.
Maintenant l'amitié, plus triste que la haine,
Sans doute pour toujours nous unit sans frisson.
Tes yeux ne brûlent plus mon âme de garçon,
Et je te tiens la main sans plaisir et sans peine.
Mon désir s'était pris aux fils de tes cheveux.
Mais ta proie est perdue, et plus rien ne t'en reste
Qu'une âme sans élan dans une chair sans geste.
L'amour est mort : demeure... Ou va t'en si tu veux.
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 24-02-2009 18:07 Sujet du message:
Résignation
Tout enfant, j'allais rêvant Ko-Hinnor,
Somptuosité persane et papale,
Héliogabale et Sardanapale !
Mon désir créait sous des toits en or,
Parmi les parfums, au son des musiques,
Des harems sans fin, paradis physiques !
Aujourd'hui, plus calme et non moins ardent,
Mais sachant la vie et qu'il faut qu'on plie,
J'ai dû refréner ma belle folie,
Sans me résigner par trop cependant.
Soit ! le grandiose échappe à ma dent,
Mais, fi de l'aimable et fi de la lie !
Et je hais toujours la femme jolie,
La rime assonante et l'ami prudent.
ô lumière amicale
ô fraîche source de la lumière
ceux qui n'ont inventé ni la poudre ni la boussole
ceux qui n'ont jamais su dompter la vapeur ni l'électricité
ceux qui n'ont exploré ni les mers ni le ciel
mais ceux sans qui la terre ne serait pas la terre
gibbosité d'autant plus bienfaisante que la terre déserte
davantage la terre
silo où se préserve et mûrit ce que la terre a de plus terre
ma négritude n'est pas une pierre, sa surdité ruée contre la clameur du jour
ma négritude n'est pas une taie d'eau morte sur l'œil mort de la terre
ma négritude n'est ni une tour ni une cathédrale
elle plonge dans la chair rouge du sol
elle plonge dans la chair ardente du ciel
elle troue l'accablement opaque de sa droite patience.
Eiapour le Kaïlcédrat royal !
Eia pour ceux qui n'ont jamais rien inventé
pour ceux qui n'ont jamais rien exploré
pour ceux qui n'ont jamais rien dompté
mais ils s'abandonnent, saisis, à l'essence de toute chose
ignorants des surfaces mais saisis par le mouvement de toute chose
insoucieux de dompter, mais jouant le jeu du monde
véritablement les fils aînés du monde
poreux à tous les souffles du monde
aire fraternelle de tous les souffles du monde
lit sans drain de toutes les eaux du monde
étincelle du feu sacré du monde
chair de la chair du monde palpitant du mouvement même du monde !
Tiède petit matin de vertus ancestrales
Sang ! Sang ! tout notre sang ému par le cœur mâle du soleil
ceux qui savent la féminité de la lune au corps d'huile
l'exaltation réconciliée de l'antilope et de l'étoile
ceux dont la survie chemine en la germination de l'herbe !
Eia parfait cercle du monde et close concordance
Écoutez le monde blanc
horriblement las de son effort immense
ses articulations rebelles craquer sous les étoiles dures
ses raideurs d'acier bleu transperçant la chair mystique
écoute ses victoires proditoires trompeter ses défaites
écoute aux alibis grandioses son piètre trébuchement
Pitié pour nos vainqueurs omniscients et naïfs !
Posté le: 25-02-2009 11:07 Sujet du message: poèsie du net
PREMIER SOURIRE DU PRINTEMPS
Tandis qu'à leurs oeuvres perverses
Les hommes courent haletants,
Mars qui rit, malgré les averses,
Prépare en secret le printemps.
Pour les petites pâquerettes,
Sournoisement lorsque tout dort,
Il repasse des collerettes
Et cisèle des boutons d'or.
Dans le verger et dans la vigne,
Il s'en va, furtif perruquier,
Avec une houppe de cygne,
Poudrer à frimas l'amandier.
La nature au lit se repose ;
Lui descend au jardin désert,
Et lace les boutons de rose
Dans leur corset de velours vert.
Tout en composant des solfèges,
Qu'aux merles il siffle à mi-voix,
Il sème aux prés les perce-neiges
Et les violettes aux bois.
Sur le cresson de la fontaine
Où le cerf boit, l'oreille au guet,
De sa main cachée il égrène
Les grelots d'argent du muguet.
Sous l'herbe, pour que tu la cueilles,
Il met la fraise au teint vermeil,
Et te tresse un chapeau de feuilles
Pour te garantir du soleil.
Puis, lorsque sa besogne est faite,
Et que son règne va finir,
Au seuil d'avril tournant la tête,
Il dit : " Printemps, tu peux venir !
THEOPHILE GAUTIER
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 25-02-2009 12:33 Sujet du message:
Dors-tu ?
Et toi ! dors-tu quand la nuit est si belle,
Quand l'eau me cherche et me fuit comme toi ;
Quand je te donne un coeur longtemps rebelle ?
Dors-tu, ma vie ! ou rêves-tu de moi ?
Démêles-tu, dans ton âme confuse,
Les doux secrets qui brûlent entre nous ?
Ces longs secrets dont l'amour nous accuse,
Viens-tu les rompre en songe à mes genoux ?
As-tu livré ta voix tendre et hardie
Aux fraîches voix qui font trembler les fleurs ?
Non ! c'est du soir la vague mélodie ;
Ton souffle encor n'a pas séché mes pleurs !
Garde toujours ce douloureux empire
Sur notre amour qui cherche à nous trahir :
Mais garde aussi son mal dont je soupire ;
Son mal est doux, bien qu'il fasse mourir !
Marceline DESBORDES-VALMORE (1786-1859)
(Recueil : Les Pleurs) _________________
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 25-02-2009 15:37 Sujet du message:
bernard lanza a écrit:
Cette lettre de George Sand à Musset est très célèbre, je suppose que tout le monde ici sait comment la lire pour qu'elle soit plus surprenante.
J'ai oublié de te répondre Bernard
Il faut la lire une ligne sur deux en commençant par la premiére
et il y a aussi la réponse de Musset
Quand je mets à vos pieds un éternel hommage
Voulez-vous qu'un instant je change de visage ?
Vous avez capturé les sentiments d'un cour
Que pour vous adorer forma le Créateur.
Je vous chéris, amour, et ma plume en délire
Couche sur le papier ce que je n'ose dire.
Avec soin, de mes vers lisez les premiers mots
Vous saurez quel remède apporter à mes maux.
Réponse de George Sand :
Cette insigne faveur que votre cour réclame
Nuit à ma renommée et répugne mon âme.
Il y a un code aussi
il faut ne faut lire que le premier mot de chaque ligne _________________
Posté le: 26-02-2009 11:55 Sujet du message: poèsie du net
À NINON
Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
L'amour, vous le savez, cause une peine extrême ;
C'est un mal sans pitié que vous plaignez vous-même ;
Peut-être cependant que vous m'en puniriez.
Si je vous le disais, que six mois de silence
Cachent de longs tourments et des voeux insensés :
Ninon, vous êtes fine, et votre insouciance
Se plaît, comme une fée, à deviner d'avance ;
Vous me répondriez peut-être : Je le sais.
Si je vous le disais, qu'une douce folie
A fait de moi votre ombre, et m'attache à vos pas :
Un petit air de doute et de mélancolie,
Vous le savez, Ninon, vous rend bien plus jolie ;
Peut-être diriez-vous que vous n'y croyez pas
Inscrit le: 10 Oct 2006 Messages: 549 Localisation: Pyrénées-Orientales
Posté le: 27-02-2009 10:33 Sujet du message:
La chair est triste
La chair est triste, hélas! et j'ai lu tous les livres.
Fuir! Là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D'être parmi l'écume inconnue et les cieux!
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe
Ô nuits! Ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai! Steamer balançant ta mâture,
Lève l'ancre pour une exotique nature!
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l'adieu suprême des mouchoirs!
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages
Sont-ils de ceux qu'un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots...
Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots!
Posté le: 27-02-2009 12:28 Sujet du message: poèsie du net
Nous dormirons ensemble
Que ce soit dimanche ou lundi
Soir ou matin minuit midi
Dans l'enfer ou le paradis
Les amours aux amours ressemblent
C'était hier que je t'ai dit
Nous dormirons ensembles
C'était hier et c'est demain
Je n'ai plus que toi de chemin
J'ai mis mon cœur entre tes mains
Avec le tien comme il va l'amble
Tout ce qu'il a de temps humain
Nous dormirons ensemble
Mon amour ce qui fut sera
Le ciel est sur nous comme un drap
J'ai refermé sur toi mes bras
Et tant je t'aime que j'en tremble
Aussi longtemps que tu voudras
Nous dormirons ensemble
LOUIS ARAGON
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 27-02-2009 14:20 Sujet du message:
La bougie bleue
Le sommeil se pointe à mon œil
Et mes rêves s’étirent vers ton cœur.
Oh comme tu me manques sous la nuit !
Être la bougie bleue qui te veille !
Celle que tu allumes aux derniers songes,
Petit phare des barques vermeilles,
Étoile sur les brumes qui s’allongent !
Oui, être cette jolie branche de cire,
Rameau couronné d’une flamme passive
Qui te bénis quand tu vas t’endormir
Et qui danse, t’emmène vers l’autre rive !
Simplement cette présence tranquille,
Bougie bleue au seuil de tes nuits,
Que tu allumes pour éteindre tes cils
Et souffler la solitude de ta vie.
Je te prendrai dans l’émotion des landes
muettement tu embrasseras ma terre
Je te prendrai dans la clarté des fontaines
avidement je te boirai
Tu portes mes amours mauves
dans la source des prunelles
écoute
les ajoncs et les plantes
vont chanter pour nous deux
la nuit fertile, la plage fraternelle
Nous referons cette Cornouaille mortelle
secrètement
dans le lit des hautes herbes
je te prendrai dans la grange verte
et ton corps aux semences mélangé
concevra tout un pays de fougères
et de genêts.
Ma belle amie sur la grève allongée
comme moi désire la mer
laisse-toi chavirer sous le vent des navires
A jouer au plus fin
On feint de ne pas comprendre
Mais on comprend que la fin
N’est pas bonne à entendre
Alors sans fin ni cesse
On veut pourtant comprendre
Etre mis au parfum
Savoir à quoi s’attendre
De cet amour défunt
Ne reste que des cendres
Mais à la fin des fins
A quoi bon se descendre
Finis le sable fin
Et toutes ces nuits tendres
Ces caresses sans fin
Et ces draps pour s’étendre
N, i ni c’est fini
C’est le commencement de la fin
On n’y croit pas on nie
On reste sur sa faim
Si la peine est immense
On sait bien que tout finit afin
Que tout recommence
On sait bien que tout meurt
Mais afin que tout vive
Tout ce qui fut demeure
Jusqu’à ce que mort s’ensuive
Moi j’ai eu la primeur
De tes caresses lascives
Tant pis pour les rumeurs
Les critiques excessives
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 01-03-2009 19:32 Sujet du message:
Renée VIVIEN (1877-1909)
(Recueil : Evocations)
Roses du soir
Des roses sur la mer, des roses dans le soir,
Et toi qui viens de loin, les mains lourdes de roses !
J'aspire ta beauté. Le couchant fait pleuvoir
Ses fines cendres d'or et ses poussières roses...
Des roses sur la mer, des roses dans le soir.
Un songe évocateur tient mes paupières closes.
J'attends, ne sachant trop ce que j'attends en vain,
Devant la mer pareille aux boucliers d'airain,
Et te voici venue en m'apportant des roses...
Ô roses dans le ciel et le soir ! Ô mes roses ! _________________
Une ronde des mots ... un poème rencontré sur le net À tous les Nous...
À tous les Nous qui, un jour, au risque de s'y blesser, se sont aventurés sur une corde tendre...
À tous les fous qui, un jour, pour un Nous, ont osé se présencer si intensément, sans filet...
À tous les Nous qui, un jour, se sont suspendus au temps d'aimer, au risque d'y rester...
À tous les Nous qui ont aimé, qui aiment, qui aimeront sans compter, malgré...
À tous les fous, quelques parfums d'un Nous dans un souvenir précieux...
À tous les fous, quelques traces d'un Nous, d'un Vous de là ...
Tel funambule
à contre-courant
le regard si loin devant
le coeur tout droit derrière
encore
un tout petit pas
tout petit
là
que voilà
il titube au silence
le soupir ne contrebalance rien
la rumeur chavire chacune de ses ombres
encore
un tout petit pas
tout petit
là
tel équilibriste
à contretemps
le coeur à l'envers
le regard à l'endroit
que voilà
il se cadence à sa ronde
la valse du tic-tac n'efface rien
sa musique berce chacune de ces notes de Vous
encore
un tout petit pas
tout petit
là
encore un tout Grand
sourire derrière
et tout petit
là
sourire devant
...
Ta palette-désir enrubanne mon ciel
D’un bleu intemporel lorsque tes yeux sourient
En éclats de tendresse ou perles démentielles
Vernissant l’éternel de nouveaux coloris
Oh sauras-tu jamais au-delà des nuances
Retouchées par ton fard en minces ligatures
Combien cette peinture au galbé de mes sens
Peaufine les contours d’un tableau hors-nature !
De ces tons pointillés en pincées impulsives
J’impressionne la nuit fumeuse de fragments
Et ma langueur s’écoule à ta gouache lascive
Infusée au talent de tes débordements
A l’instant où ma chair inspire à tes étreintes
La toile originale imagée par tes doigts
Je renais à l’amour comme si chaque teinte
Me révélait à toi pour la première fois !
Accourez vite à nos splendides fêtes !
Ici banquets, là concert, ailleurs bal.
Les diamants rayonnent sur les têtes,
Le vin rougit les coupes de cristal.
Ce luxe altier qui partout se déroule,
Le peuple va le payer en gros sous.
Municipaux, au loin chassez la foule.
Amusons-nous !
Quel beau festin ! mets précieux et rares,
Dont à prix d'or on eut chaque morceau,
Vins marchandés aux crus les plus avares
Et que le temps a scellés de son sceau...
Quel est ce bruit ?... - Rien, c'est un prolétaire
Qui meurt de faim à quelques pas de vous.
- Un homme mort ?... C'est fâcheux ! Qu'on l'enterre.
Enivrons-nous !
Voici des fruits qu'à l'automne
Vole à grand frais l'été pour ces repas :
Là, c'est l'Aï dont la mousse écumeuse
Suit le bouchon qui saute avec fracas...
Qu'est-ce ?... un pétard que la rage éternelle
Des factieux ? - Non, non, rassurez-vous !
Un commerçant se brûle la cervelle...
Enivrons-nous !
Duprez commence... Ô suaves merveilles !
Gais conviés, désertez vos couverts.
C'est maintenant le bouquet des oreilles ;
On va chanter pour mille écus de vers.
Quel air plaintif vient jusqu'en cette enceinte ?...
Garde, alerte ! En prison traînez tous
Ce mendiant qui chante une complainte...
Enivrons-nous !
Femmes, au bal ! La danse vous appelle ;
Des violons entendez les accords.
Mais une voix d'en haut nous interpelle .
Tremblez ! tremblez ! vous dansez sur les morts
Ce sol maudit que votre valse frôle,
Le fossoyeur le foulait avant nous... "
Tant mieux ! la terre est sous nos pieds plus molle.
Trémoussez-vous !
Chassons bien loin cette lugubre image
Qui du plaisir vient arrêter l'essor.
Déjà pâlit sous un autre nuage
Notre horizon de parures et d'or.
C'est Waterloo... Pardieu, que nous importe !
Quand l'étranger eut tiré les verroux,
On nous a vu entrer par cette porte...
Trémoussez-vous !
Çà, notre fête est brillante peut-être ?
Elle a coûté neuf cent vingt mille francs.
Qu'en reste-t-il ? Rien... sur une fenêtre,
Au point du jour, des lampions mourants.
Quand le soleil éclairera l'espace,
Cent mobiliers seront vendus dessous.
Vite, aux recors, calèches, faites place...
Éloignons-nous !
Adieu, la vapeur siffle, on active le feu ;
Dans la nuit le train passe ou c'est l'ancre qu'on lève ;
Qu'importe ! on vient, on part ; le flot soupire : adieu !
Qu'il arrive du large ou qu'il quitte la grève.
Les roses vont éclore, et nous les cueillerons ;
Les feuilles du jardin vont tomber une à une.
Adieu ! quand nous naissons, adieu ! quand nous mourons
Et comme le bonheur s'envole l'infortune.
Posté le: 05-03-2009 12:10 Sujet du message: poèsie du net
Il y a de quoi dans ma maison
Il y a de quoi boire et de gros biftecks dans ma maison.
De quoi rire et de quoi s'aimer et de quoi pas.
De quoi passer sa rage et apaiser son temps.
De quoi faire attention et de n'y prendre garde.
Des fenêtres pour obstruer, des portes qui ferment clair.
Des arbres sans horizon et des beaux. Des bêtes à toutes voix.
Il y a place pour des animaux anges dans ma maison.
Pour des anneaux parfaits, pour les rêves qui débordent.
Pour de petits coeurs, du genre : soupirs de veau.
Place pour le feu et pour les pierres.
Pour du nuage en foule et pour la dent des rats.
Il y aura place pour nous y étendre.
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 07-03-2009 14:48 Sujet du message:
L'autre jour
Pierre de RONSARD (1524-1585)
(Recueil : Sonnets pour Hélène)
L'autre jour que j'étais sur le haut d'un degré,
Passant tu m'avisas et, me tournant la vue,
Tu m'éblouis les yeux, tant j'avais l'âme émue
De me voir en sursaut de tes yeux rencontré.
Ton regard dans le coeur, dans le sang m'est entré,
Comme un éclat de foudre, alors qu'il fend la nue ;
J'eus de froid et de chaud la fièvre continue,
D'un si poignant regard mortellement outré.
Et si ta blanche main passant ne m'eût fait signe,
Main blanche qui se vante d'être fille d'un Cygne,
Je fusse mort, Hélène, aux rayons de tes yeux ;
Mais ton signe retint l'âme presque ravie,
Ton oeil se contenta d'être victorieux,
Ta main se réjouit de me donner la vie. _________________
Posté le: 08-03-2009 14:38 Sujet du message: poèsie du net
ELSA AU MIROIR
C'était au beau milieu de notre tragédie
Et pendant un long jour assise à son miroir
Elle peignait ses cheveux d'or Je croyais voir
Ses patientes mains calmer un incendie
C'était au beau milieu de notre tragédie
Et pendant un long jour assise à son miroir
Elle peignait ses cheveux d'or et j'aurais dit
C'était au beau milieu de notre tragédie
Qu'elle jouait un air de harpe sans y croire
Pendant tout ce long jour assise à son miroir
Elle peignait ses cheveux d'or et j'aurais dit
Qu'elle martyrisait à plaisir sa mémoire
Pendant tout ce long jour assise à son miroir
À ranimer les fleurs sans fin de l'incendie
Sans dire ce qu'une autre à sa place aurait dit
Elle martyrisait à plaisir sa mémoire
C'était au beau milieu de notre tragédie
Le monde ressemblait à ce miroir maudit
Le peigne partageait les feux de cette moire
Et ces feux éclairaient des coins de ma mémoire
C'était un beau milieu de notre tragédie
Comme dans la semaine est assis le jeudi
Et pendant un long jour assise à sa mémoire
Elle voyait au loin mourir dans son miroir
Un à un les acteurs de notre tragédie
Et qui sont les meilleurs de ce monde maudit
Et vous savez leurs noms sans que je les aie dits
Et ce que signifient les flammes des longs soirs
Et ses cheveux dorés quand elle vient s'asseoir
Et peigner sans rien dire un reflet d'incendie
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 08-03-2009 16:58 Sujet du message:
Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie
Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.
Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.
Louise LABÉ (1524-1566)
(Recueil : Sonnets) _________________
Posté le: 10-03-2009 14:35 Sujet du message: poèsie du net
DEMAIN DÈS L'AUBE
Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai - Vois-tu, je sais que tu m'attends -
J'irai par la forêt, j'irai par la montagne -
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Honfleur,
Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 10-03-2009 14:39 Sujet du message:
LE PRINTEMPS DU POETE
Les garrigues, en mai, épandent leurs essences,
Mêlées de miel léger au velours des couleurs ;
Les oiseaux, au maquis, trillent douces romances
Aux soupirs éthérés des brins d’air sur les fleurs.
Dans les jardins fleuris les couronnes de roses,
Blanches, jaunes, carmin à côté des lilas,
Dressent en majesté hampes d’apothéoses,
Offrant l’orgueil naissant tout près des pergolas.
La nature s’habille au baiser du printemps ;
Les gazons reposés, près des sources sereines,
Dessinent des tapis au soyeux éclatant,
Où les beaux papillons en ont fait leurs domaines.
Le poète envoûté, dans le silence chaud,
Peut ouvrir son carnet aux rayons de lumière,
Et, d’un sourire en fleur, assis sous l’arbrisseau,
Ecrire en vers feutrés pour la rose trémière.
Posté le: 12-03-2009 13:02 Sujet du message: poèsie du net
À NINON
Si je vous le disais pourtant, que je vous aime,
Qui sait, brune aux yeux bleus, ce que vous en diriez ?
L'amour, vous le savez, cause une peine extrême ;
C'est un mal sans pitié que vous plaignez vous-même ;
Peut-être cependant que vous m'en puniriez.
Si je vous le disais, que six mois de silence
Cachent de longs tourments et des voeux insensés :
Ninon, vous êtes fine, et votre insouciance
Se plaît, comme une fée, à deviner d'avance ;
Vous me répondriez peut-être : Je le sais.
Si je vous le disais, qu'une douce folie
A fait de moi votre ombre, et m'attache à vos pas :
Un petit air de doute et de mélancolie,
Vous le savez, Ninon, vous rend bien plus jolie ;
Peut-être diriez-vous que vous n'y croyez pas.
Inscrit le: 30 Déc 2008 Messages: 2533 Localisation: pays de loire
Posté le: 13-03-2009 22:21 Sujet du message:
Un gentil poème sur l'argent.
L'argent.
Il peut acheter une maison
Mais pas un foyer
Il peut acheter un lit
Mais pas le sommeil
Ilpeut acheter une horloge
Mais pas le temps Il peut acheter un livre
Mais pas la connaissance
Il peut acheter une position
Mais pas le respect
Il peut payer le médecin
Mais pas la santé
Il peut acheter le sang
Mais pas la vie
Il peut acheter du sexe
Mais pas l'amour
Precepte chinois
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 21-03-2009 15:39 Sujet du message: Re: réponse
Marie a écrit:
trés belle poèsie merci!!!!!!!!!
Marie, Je pense que tu as la même émotion que moi en pensant à Bernard
Je ne lirais plus jamais une poésie sans penser à sa façon d'aimer les femmes et de l'exprimer avec de si belles paroles. _________________
Posté le: 22-03-2009 12:09 Sujet du message: réponse
oui tu as raison c'est avec un serrement de coeur que je pense a lui ,je vais chercher un poème pour lui!!!!!!
Est-ce ainsi que les hommes vivent
Tout est affaire de décor
Changer de lit changer de corps
À quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m'éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j'ai cru trouver un pays.
Cœur léger cœur changeant cœur lourd
Le temps de rêver est bien court
Que faut-il faire de mes nuits
Que faut-il faire de mes jours
Je n'avais amour ni demeure
Nulle part où je vive ou meure
Je passais comme la rumeur
Je m'endormais comme le bruit.
C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien
Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent
Dans le quartier Hohenzollern
Entre La Sarre et les casernes
Comme les fleurs de la luzerne
Fleurissaient les seins de Lola
Elle avait un cœur d'hirondelle
Sur le canapé du bordel
Je venais m'allonger près d'elle
Dans les hoquets du pianola.
Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke.
Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.
Elle était brune elle était blanche
Ses cheveux tombaient sur ses hanches
Et la semaine et le dimanche
Elle ouvrait à tous ses bras nus
Elle avait des yeux de faÏence
Elle travaillait avec vaillance
Pour un artilleur de Mayence
Qui n'en est jamais revenu.
Il est d'autres soldats en ville
Et la nuit montent les civils
Remets du rimmel à tes cils
Lola qui t'en iras bientôt
Encore un verre de liqueur
Ce fut en avril à cinq heures
Au petit jour que dans ton cœur
Un dragon plongea son couteau
Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 22-03-2009 16:40 Sujet du message:
Voici un autre poésie d'Aragon qu'il aimait
Du Poète à son Parti
Mon parti m'a rendu mes yeux et ma mémoire
Je ne savais plus rien de ce qu'un enfant sait
Que mon sang fût si rouge et mon coeur fût français
Je savais seulement que la nuit était noire
Mon parti m'a rendu mes yeux et ma mémoire
Mon parti m'a rendu le sens de l'épopée
Je vois Jeanne filer Roland sonne le cor
C'est le temps des héros qui renaît au Vercors
Les plus simples des mots font le bruit des épées
Mon parti m'a rendu le sens de l'épopée
Mon parti m'a rendu les couleurs de la France
Mon parti mon parti merci de tes leçons
Et depuis ce temps-là tout me vient en chansons
La colère et l'amour la joie et la souffrance
Mon parti m'a rendu les couleurs de la France
Louis Aragon
Je n'ai pas vu que ces poésies étaient si tristes ces derniers temps _________________
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 24-03-2009 19:30 Sujet du message:
Luxures
Chair ! ô seul fruit mordu des vergers d'ici-bas,
Fruit amer et sucré qui jutes aux dents seules
Des affamés du seul amour, bouches ou gueules,
Et bon dessert des forts, et leurs joyeux repas,
Amour ! le seul émoi de ceux que n'émeut pas
L'horreur de vivre, Amour qui presses sous tes meules
Les scrupules des libertins et des bégueules
Pour le pain des damnés qu'élisent les sabbats,
Amour, tu m'apparais aussi comme un beau pâtre
Dont rêve la fileuse assise auprès de l'âtre
Les soirs d'hiver dans la chaleur d'un sarment clair,
Et la fileuse c'est la Chair, et l'heure tinte
Où le rêve étreindra la rêveuse, - heure sainte
Ou non ! qu'importe à votre extase, Amour et Chair ?
Posté le: 25-03-2009 12:09 Sujet du message: poèsie du net
Sonnet à Marie
Je vous envoie un bouquet que main
Vient de trier de ces fleurs épanouies ;
Qui ne les eût à ce vêpres cueillies,
Chutes à terre elles fussent demain.
Cela vous soit un exemple certain
Que vos beautés, bien qu'elles soient fleuries,
En peu de temps cherront, toutes flétries,
Et, comme fleurs, périront tout soudain.
Le temps s'en va, le temps s'en va, ma dame
Las ! le temps, non, mais nous nous en allons,
Et tôt serons étendus sous la lame ;
Et des amours desquelles nous parlons,
Quand serons morts, n'en sera plus nouvelle.
Pour c'aimez-moi cependant qu'êtes belle
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 26-03-2009 21:19 Sujet du message:
Pour le retour du Soleil honorer
Pour le retour du Soleil honorer,
Le Zéphir l'air serein lui appareille,
Et du sommeil l'eau et la terre éveille,
Qui les gardait, l'une de murmurer
En doux coulant, l'autre de se parer
De mainte fleur de couleur nonpareille.
Jà les oiseaux ès arbres font merveille,
Et aux passants font l'ennui modérer ;
Les nymphes jà en mille jeux s'ébattent
Au clair de lune, et dansant l'herbe abattent.
Veux-tu, Zéphir, de ton heur me donner,
Et que par toi toute me renouvelle ?
Fais mon Soleil devers moi retourner,
Et tu verras s'il ne me rend plus belle.
Louise LABÉ (1524-1566)
(Recueil : Sonnets) _________________
Posté le: 28-03-2009 14:23 Sujet du message: poèsie du net
DÉJEUNER DU MATIN
Il a mis le café
Dans la tasse
Il a mis le lait
Dans la tasse de café
Il a mis le sucre
Dans le café au lait
Et il a reposé la tasse
Sans me parler
Il a allumé
Une cigarette
Il a fait des ronds
Avec la fumée
Il a mis les cendres
Dans le cendrier
Sans me parler
Sans me regarder
Il s'est levé
Il a mis
Son chapeau sur sa tête
Il a mis
Son manteau de pluie
Parce qu'il pleuvait
Et il est parti
Sous la pluie
Sans une parole
Sans me regarder
Et moi j'ai pris
Ma tête dans ma main
Et j'ai pleuré
Posté le: 29-03-2009 13:36 Sujet du message: Je suis un homme
Je suis un homme de Cro-Magnon
Je suis un singe ou un poisson
Sur la Terre en toute saison
Moi je tourne en rond, je tourne en rond.
Je suis un seul puis des millions
Je suis un homme au coeur de lion
A la guerre en toute saison
Moi je tourne en rond, je tourne en rond.
Je suis un homme plein d'ambition
Belle voiture et belle maison
Dans la chambre ou dans le salon
Moi, je tourne en rond, je tourne en rond.
Je fais l'amour et la révolution
Je fais le tour de la question
J'avance, avance à reculons
Et je tourne en rond, je tourne en rond.
Tu vois, j'suis pas un homme,
Je suis le roi de l'illusion
Au fond qu'on me pardonne
Je suis le roi, le roi des cons.
Je fais le monde à ma façon
Coulé dans l'or et le béton
Corps en cage, jeté en prison
Moi je tourne en rond, je tourne en rond.
Assis devant ma télévision
Je suis, de l'homme, la négation
Pur produit de consommation
Oui mon compte est bon
Mon compte est bon.
Tu vois, j'suis pas un homme,
Je suis le roi de l'illusion
Au fond, qu'on me pardonne
Je suis le roi, le roi des cons .
C'est moi, le maître du feu,
Le maître de jeu, le maître du monde
Et vois ce que j'en ai fait,
Une Terre glacée, une Terre brûlée,
La Terre des hommes que les hommes abandonnent.
Je suis un homme au pied du mur
Comme une erreur de la nature
Sur La Terre sans d'autres raisons
Moi je tourne en rond, je tourne en rond
Inscrit le: 13 Jan 2008 Messages: 6634 Localisation: Normandie
Posté le: 29-03-2009 14:32 Sujet du message:
Ce grand méchant vous
by Serge Gainsbourg
Promenons-nous dans le moi
Pendant qu'le vous n'y est pas
Car si le vous y était
Sûr'ment il nous mangerait
J'ai peur, j'ai peur du grand méchant vous
Ah ! la vilaine bête que ce vous !
Mais je ne sais comment j'arriverai à chasser
Pour toujours ce grand méchant vous de mes pensées
Promenons-nous dans le moi
Pendant qu'le vous n'y est pas
Car si le vous y était
Sûr'ment il nous mangerait
Je me suis mis dans la gueule du vous !
Ah ! quel enragé que ce vous !
Combien de nuits ce grand méchant vous m'a sauté
À la gorge, comme j'allais le caresser
Promenons-nous dans le moi
Pendant qu'le vous n'y est pas
Car si le vous y était
Sûr'ment il nous mangerait
Je ne sais hurler avec le vous
Ah ! quel animal que ce vous !
Mais comment savoir dans cette rivalité
Qui de l'homme ou du vous l'emporte en cruauté ?
Promenons-nous dans le moi
Pendant qu'le vous n'y est pas
Car si le vous y était
Sûr'ment il nous mangerait _________________
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